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Du donjon à la Cité royale
En 1013, Foulques III Nerra débute la construction d’un donjon de 36 mètres sur un éperon rocheux qui domine la vallée de l’Indre. Partout en Touraine, le comte d’Anjou, surnommé « le faucon noir » érige des places fortes pour se protéger des assauts de son cousin Eudes, le comte de Blois. Chef-d’œuvre de l’architecture militaire du XIe siècle, ce donjon roman, qui sert à la fois de résidence et de poste de défense, est l’un des mieux conservés de France.
Au XIIe siècle, Henri II Plantagenêt fait ériger des remparts et creuser un fossé pour protéger la forteresse sur son flanc sud. En 1193, la place-forte est cédée par Jean Sans Terre à Philippe-Auguste. Ce dernier y affrontera Richard Cœur de Lion dans un siège qui, selon la légende, ne durera que trois heures. Il faut attendre le milieu du XIIIe siècle pour que la forteresse soit intégrée au domaine royal par Saint-Louis. Un premier logis est alors édifié au XIVe siècle, à quelques pas du donjon, par le duc Louis Ier d’Anjou. Dès lors, la Cité ne connaîtra plus d’affrontements majeurs.
Jeanne, Agnès et Anne
Malgré l’austérité apportée par la Guerre de Cent Ans, c’est sous le règne de Charles VII que la forteresse s’étoffe et devient une résidence royale à part entière. En mai 1429, dans la grande salle du château, le dauphin Charles rencontre Jeanne d’Arc, de retour d’Orléans. C’est ici que la pucelle le convainc de la suivre à Reims pour y être couronné. Le sacre aura lieu quelques mois plus tard. Mais c’est pour l’amour d’une autre femme que le souverain se rendra régulièrement à Loches les années suivantes.
En 1443, Charles VII rencontre la belle Agnès Sorel, demoiselle de compagnie d’Isabelle de Lorraine. Immédiatement conquis par sa beauté et son esprit brillant, Charles VII la fait nommer demoiselle d’atours de son épouse Marie d’Anjou et la présente bientôt à la cour comme sa favorite officielle. À partir de 1444, Agnès Sorel réside régulièrement à Loches et poursuit les travaux initiés au logis royal. Pendant près de sept ans, le couple va vivre une grande histoire dont naîtront trois filles, légitimées par Louis XI. Morte en couche à l’âge de 28 ans, la jeune favorite est inhumée dans le latéral gauche de la collégiale Saint-Ours à Loches, où l’on peut aujourd’hui admirer son magnifique gisant de marbre.
À la fin du XVe siècle, le logis est agrandi à la demande de Louis XII et d’Anne de Bretagne. Jusqu’à sa mort, cette dernière effectue à Loches de longs séjours, notamment après le décès brutal de Charles VIII. Parmi les ajouts commandés par la reine, une nouvelle aile, dans l’axe du logis de Louis d’Anjou, et un magnifique oratoire de style gothique flamboyant.
Une prison de tuffeau
Pendant ce siècle qui vit passer de nombreux personnages illustres, le donjon devient une prison d’État. Des prisonniers politiques de haut rang y sont enfermés comme Jean II d’Alençon, Philippe de Commynes, Jean de Poitiers ou encore Ludovic Sforza, Duc de Milan, auquel on attribue de magnifiques peintures sur la paroi d’un des cachots du martelet (tour semi-souterraine du donjon).
Au début du XVIe siècle, François Ier sera le dernier roi à séjourner brièvement dans la Cité royale de Loches, alors que s’annonce le retour de la dynastie Valois en Ile-de-France. En 1539, la rencontre du souverain avec Charles Quint marque la fin des événements royaux d’ampleur dans la Cité qui plonge bien vite dans un sommeil de plusieurs siècles.
Utilisée comme prison et comme tribunal à la Révolution, la Cité abritera également les bureaux de la sous-préfecture jusqu’en 1926. Il faut attendre les années 50 et son acquisition par le Conseil Départemental pour que le site soit de manière pleine et entière ouvert au public.
Des visites immersives
Aujourd’hui, la Cité royale de Loches accueille près de 100 000 visiteurs par an. Maquettes tactiles, animations vidéo et jalons sonores offrent au visiteur un formidable voyage dans le temps à la rencontre de l’Histoire de France. Une visite en réalité augmentée de dix espaces propose une projection quasi immersive dans les différentes salles du donjon, aujourd’hui disparues ou réaménagées. Nul doute que ce site, empreint d’histoire et d’élégance, séduira petits et grands, transportés au cœur du Moyen-Âge.
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